Les Corbeaux 1 Seigneur, quand froide est la prairie, 2 Quand, dans les hameaux abattus, 3 Les longs angélus se sont tus... 4 Sur la nature défleurie 5 Faites s'abattre des grands cieux 6 Les chers corbeaux délicieux. 7 Armée étrange aux cris sévères, 8 Les vents froids attaquent vos nids! 9 Vous, le long des fleuves jaunis, 10 Sur les routes aux vieux calvaires, 11 Sur les fossés et sur les trous 12 Dispersez-vous, ralliez-vous! 13 Par milliers, sur les champs de France, 14 Où dorment des morts d'avant-hier, 15 Tournoyez, n'est-ce pas, l'hiver, 16 Pour que chaque passant repense! 17 Sois donc le crieur du devoir, 18 Ô notre funèbre oiseau noir! 19 Mais, saints du ciel, en haut du chêne, 20 Mât perdu dans le soir charmé, 21 Laissez les fauvettes de mai 35
22 Pour ceux qu'au fond du bois enchaîne, 23 Dans l'herbe d'où l'on ne peut fuir, 24 La défaite sans avenir. 5 La Renaissance littéraire et artistique 1872 9 14 1870 1870 5 24 3 Le Parnasse contemporain (2) 1870 1871 1872 1870 1871 36
12 «Poésies» 1872 5 6 «Derniers vers» «Vers nouveaux» 2 1 1 8 6 4 1 (3) (4) 1 Dispersez-vous, ralliez-vous! 37
(5) Plates-bandes d amarantes 1 Banc vert où chante au paradis d'orage, Sur la guitare, la blanche Irlandaise. Puis de la salle à manger guyanaise Bavardage des enfants et des cages. Fenêtre du duc qui fais que je pense Au poison des escargots et du buis Qui dort ici-bas au soleil. Et puis C'est trop beau! trop! Gardons notre silence. Boulevart sans mouvement ni commerce Muet, tout drame et toute comédie, Réunion des scènes infinie, Je te connais et t'admire en silence. poison trop beau 38
1873 Une saison en enfer 1 Entends comme brame près des acacias en avril la rame viride du pois! Dans sa vapeur nette, vers Phœbé! tu vois s'agiter la tête de saints d'autrefois... Loin des claires meules des caps, des beaux toits, ces chers Anciens veulent ce philtre sournois... Or ni fériale 39
ni astrale! n'est la brume qu'exhale ce nocturne effet. Néanmoins ils restent, Sicile, Allemagne, dans ce brouillard triste et blêmi, justement! 4 chers Anciens 1875 Illuminations Guerre Enfant, certains ciels ont affiné mon optique (8) 1871 5 voyant 4 Néanmoins ils restent néanmoins 40
brouillard triste et blêmi justement! nocturne effet Entends comme brame 18 funèbre 15 16 1 1871 5 15 Paul Demeny 1 langue Cette langue sera de l'âme pour l'âme, résumant tout, parfums, sons, couleurs, de la pensée accrochant la pensée et tirant. Le poète définirait la quantité d'inconnu s'éveillant en son temps dans l'âme universelle : il donnerait plus que la formule de sa pensée, que la notation de sa marche au Progrès! Énormité devenant 41
norme, absorbée par tous, il serait vraiment un multiplicateur de progrès! sur les champs de France 16 repenser 10 14 des morts d'avant-hier 42
3 5 11 armée 7 43
2 funèbre oiseau noir 18 saints du ciel 19 Seigneur 1 4 funèbre Seigneur 1 (1) Arthur Rimbaud, Œuvres complètes I Poésies, Édition critique avec introduction et notes par Steve Murphy, Honoré Champion, 1999 p. 801 44
4 p. 802 805 1994 1996 1 fauvette 81 98 Jean-Claude Chantelat Les oiseaux de France (Solar, cinquième édition, 1998) Sylvia fauvette (2) p. 802-805 (3) p. 802-805 (4) Rimbaud, Œuvres complètes, Correspondance, édition présentée et établie par Louis Forestier, Robert Laffont, 1992 p. 450-451 (5) 1 Le buffet 3 ((p. 282)) Ô buffet du vieux temps, tu sais bien des histoires, Et tu voudrais conter tes contes, et tu bruis Quand s'ouvrent lentement tes grandes portes noires. grandes portes noires 3 45
(6) p. 859-860 (7) p. 813 (8) Rimbaud, Œuvres complètes, Introduction, chronologie, édition, notes, notices et bibliographie par Pierre Brunel, La Pochothèque, 1999, p. 491 (9) p. 246 (10) «Le passant doit «repenser» non seulement aux morts, mais au régime qui a entraîné leur sacrifice, et se sentir fortifié dans le devoir républicain.» Rimbaud, Œuvres, édition de Suzanne Bernard, Garnier, 1960 Les Corbeaux p. 385 des morts d'avant-hier 1871 «L'expression est étrange : pourquoi pas plutôt les morts «d'hier»? (...) peut-être les morts de la guerre sont-ils d'avant-hier par rapport à ceux de la Commune, morts en 1871.» (11) «Les fauvettes de mai sont, dit Bouillane de Lacoste, des symboles d'espérance et de confiance en l'avenir. Mais comment peut-il arriver à ce sens, alors que Rimbaud parle au contraire de la défaite sans avenir? Il semble au contraire que Rimbaud demande qu'à la fin de l'hiver, comme consolation dernière, les fauvettes de mai reviennent dans les bois où reposent, «enchaînés» par la mort, les soldats victimes d'une défaite dont ils ne sont pas responsables. Tout le poème traduit l'horreur d'une défaite et d'une mort stupides.» p. 385 1 La Rivière de Cassis 46